Si la Toussaint est la fête des gens heureux, on peut se demander quel est donc le bonheur que connaissent ceux que nous appelons les saints ? Nous ne savons pas bien dire ce qui est capable de nous rendre heureux. Pour nous, être heureux, c’est vivre sous certaines conditions : une bonne santé, une famille unie, des amis fidèles, pas de soucis, un bon niveau de vie. Dès que nous parlons bonheur, nous commençons par faire l’inventaire de tout ce qu’il nous faudrait pour être parfaitement heureux. Mais les saints, n’ont-ils pas connu des épreuves, comme martyrs par exemple ? D’autres n’ont-ils pas affronté de nombreuses difficultés ou pris des engagements héroïques ?
Pour commencer son enseignement, Jésus parle à des gens qui vivent qui n’ont pas la vie facile et sont écrasés par les injustices. Il leur annonce que le Royaume est pour eux. Comprenons bien que Jésus les proclame heureux, non pas de ce qu’ils souffrent mais parce que dans leur pauvreté, ils sont les premiers destinataires de ce royaume. Que veut dire être pauvre de cœur ? C’est accueillir Dieu dans sa vie, au centre de tout. Pour cela, il importe de ne pas être rempli de soi-même, saturé, satisfait. Il importe d’être en attente, en espérance, en demande.
Pour nous aider à voir ce dont il s’agit, l’évangéliste Matthieu déploie six autres chemins : heureux les doux, heureux ceux qui pleurent, les miséricordieux, ceux qui ont le cœur purs, les artisans de paix… En un mot, heureux ceux qui sont tendus vers ce que le monde ne peut pas donner. Alors, ils s’engagent pour la justice, pour le respect des droits des personnes, pour un meilleur partage, une plus grande fraternité entre les humains. En vivant ainsi, on paie de sa personne, mais on empêche le monde de sombrer dans la tristesse et dans la désespérance.
L’évangile des béatitudes est plus que jamais pour ce temps de crises, où nous sommes inquiets de l’avenir du monde. Car nous sommes bien démunis devant les défis tels que la misère des peuples, l’inégale répartition des richesses et le manque de liberté dans de nombreux pays. C’est là que nous pouvons nous tourner vers les saints, qui ont pratiqué une foi en actes, une charité inventive à leur mesure, humblement, fidèlement. Nous pouvons regarder ces vies données au quotidien et nous laisser inspirer par eux.
Il y a les saints qui sont connus, nommés tout au long de l’année, mais aussi les inconnus, qui ont vécu de manière effacée, discrète, qui ont renoncé à toute reconnaissance. Leur récompense ? Savoir qu’ils sont filles et fils de Dieu et que Dieu se donnera à voir à eux, tel qu’il est, le Père de toute miséricorde et de toute consolation. Ces saints connus ou anonymes, ce sont nos sœurs et nos frères. Nous sommes en route avec eux, en communion avec eux, soutenus par leur prière et encouragés quand nous regardons comment ils se sont donnés pour la vie.